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Quel rôle pour l’hydrogène dans la production de chaleur industrielle dans un monde zéro net ?

Dans les modèles développés par l’Energy Science Center de l’EPFZ, on ne trouvera pas d’utilisation de l’hydrogène suisse dans la production de chaleur industrielle. En revanche, les combustibles solides et l’électricité notamment sont appelés à remplir ce rôle, surtout pour les températures élevées.

Pour parvenir à une réduction des émissions de gaz à effet de serre à zéro net, il faut également trouver des solutions pour les secteurs pour lesquels il n’est guère possible de renoncer à des agents énergétiques chimiques. Outre le trafic aérien, l’industrie est concernée, notamment en ce qui concerne la production de chaleur industrielle à haute température.  

Actuellement, 32 % – soit 12 térawattheures (TWh) par an – environ de l’énergie nécessaire à l’industrie suisse sont couverts par les combustibles fossiles (OFEN, 2023 ; tableau 4). Ce secteur représente 23 % du total des émissions suisses de CO2 (OFEV, 2022). En partenariat avec d’autres institutions suisses, une équipe de l’Energy Science Center de l’EPFZ, analyse dans le cadre du projet SWEET DeCarbCH comment réduire ces émissions. Le projet s’appuie notamment sur la modélisation du système énergétique suisse dans son ensemble, pour déterminer quels sont les combustibles et les technologies qui permettront la production de la chaleur industrielle nécessaire à l’industrie.  

Nos modèles actuels partent du principe que la consommation finale de chaleur industrielle restera dans les grandes lignes au niveau actuel de 20 TWh par an en 2050. Le choix des technologies à employer pour produire cette chaleur dépend de la température des procédés nécessaire, et bien évidemment de la capacité concurrentielle de la technologie en question. Les procédés industriels requièrent des températures variées, qui vont de 80 °C à bien au-delà de 1000 °C pour la fabrication de ciment. Déterminer avec précision la température à laquelle correspond effectivement le besoin de chaleur industrielle s’est avéré difficile. Pour la modélisation actuelle, par simplification, nous avons donc défini une répartition de la consommation finale (fabrication de ciment non comprise) dans trois plages de température comme suit : 25 % pour les températures inférieures à 100 °C, 25 % pour les températures comprises entre 100 et 200 °C et 50 % pour les températures de plus de 200 °C. 

Large gamme de températures nécessaires

Le solaire thermique et la géothermie en profondeur sont des technologies adaptées aux températures inférieures à 100 °C. Pour atteindre les températures recherchées dans la plage moyenne, entre 100 et 200 °C, ces deux sources peuvent être complétées par une pompe à chaleur industrielle. Autre possibilité, des installations de couplage chaleur-force (installations CCF) pourront produire la vapeur nécessaire aux procédés.  

Les procédés à haute température (plus de 200 °C) exigent des procédés de combustion ou encore des chauffages à résistance qui convertissent l’électricité directement en chaleur. Pour la production de ciment, seuls des procédés de combustion sont envisageables. Les combustibles disponibles pour ce faire sont surtout des gaz (méthane, hydrogène), des liquides (mazout) et des solides (déchets, bois, boues d’épuration, charbon).  

L’équipe de l’EPFZ a calculé un grand nombre de scénarios pour chercher des solutions permettant de fournir de la chaleur industrielle dans une démarche zéro net (illustration 1). Nous avons défini les scénarios sur la base de trois éléments : la valeur cible des émissions de CO2 autorisées (axe des x : de 24 mégatonnes à zéro tonne de CO2 par an) ; le lien Suisse – Europe (ensemble – seule), et le degré d’intégration des innovations – la géothermie par exemple – (conservateur – innovant). 

L’illustration ci-dessus présente la chaleur industrielle produite en 2050. Les trois plages de température mentionnées sont additionnées et réparties selon les différentes sources de chaleur. On observe d’abord que les différentes sources sont présentes dans des proportions relativement égales les unes aux autres ; en d’autres termes, il n’existe pas de source qui dominerait sans équivoque. Lorsque les objectifs fixés pour le CO2 sont élevés – là où des émissions de CO2 d’origine fossile sont encore autorisées –, il existe une forte proportion de combustibles gazeux, pour la plupart du méthane d’origine fossile. Sur la voie du zéro émission net, on observe un passage aux combustibles solides (déchets et bois) et à l’électricité. Lorsque la géothermie est disponible dans les scénarios innovants, elle fournit une quantité de chaleur considérable dans la plage de température basse (inférieure à 100 °C). Dans les scénarios conservateurs dans lesquels l’option de la géothermie n’entre pas en ligne de compte, ce rôle est assumé par le solaire thermique. 

Le méthane, la source la plus importante de combustibles gazeux

La catégorie des combustibles gazeux fournit encore cinq térawattheures par an dans un scénario zéro net ; la proportion d’hydrogène est extrêmement faible, la source la plus importante étant le méthane, qu’il s’agisse de gaz naturel importé d’origine fossile ou de biométhane. La disponibilité du biométhane est toutefois tributaire d’une forte augmentation de l’utilisation de lisier dans la production de biogaz. La faible proportion de l’hydrogène s’explique notamment par le fait que l’utilisation d’électrolyse suivie d’une combustion demande nettement plus d’électricité que lorsque l’électricité est utilisée directement dans un chauffage à résistance.  

L’option de l’hydrogène importé

Mis ensemble, ces résultats indiquent que l’hydrogène suisse jouera un rôle faible dans les applications industrielles à haute température. Ce résultat dépend surtout de la disponibilité d’options alternatives. Mais il est aussi nécessaire que des agents énergétiques chimiques suisses comme le biométhane, le bois ou les déchets soient employés avant tout pour des applications à haute température et non pas pour la production de chaleur ambiante ou d’eau industrielle. L’hydrogène importé pourrait toutefois constituer une option concurrentielle à l’avenir ; il reste toutefois à voir comment l’Europe développera son infrastructure à hydrogène et dans quelle mesure la Suisse pourra se raccorder à ce réseau. 

Références 

Les auteurs 

Rebecca Lordan-Perret est Scientific Outreach Manager de l’Energy Science Center (ESC) de l’EPFZ.

Gianfranco Guidati est directeur adjoint de l’Energy Science Center (ESC) de l’EPFZ. 

Fondée il y a plus d’un siècle, Mikron Machining SA est aujourd’hui leader mondial de l’assemblage de machines industrielles ultraprécises, destinées par exemple à la fabrication de composants horlogers, ou de pointes de stylos à bille, pour lesquelles elle détient plus de 95 % du marché mondial. Comment associer la fabrication de machines industrielles ultraprécises avec l’amélioration de son bilan énergétique ? Pour le savoir, nous avons rencontré Bruno Jöhl, chef Supply Chain Division Machining, au siège d’Agno (TI).  

La société Mikron Machining SA, qui fait partie du groupe Mikron, compte actuellement environ 400 collaborateurs (sur un total de 1300) et produit des machines industrielles.

Lorenzo Medici et Bruno Jöhl.

Bruno Jöhl.

Le siège de Mikron Machining SA est situé à Agno (TI), au bord du lac de Lugano. Alors que les grands palmiers qui en ornent l’entrée sont évocateurs de détente, les collaborateurs et collaboratrices sont concentrés sur les machines capables de fabriquer des pièces au millième de millimètre près, soit avec une précision équivalente à une fraction du diamètre d’un cheveu. Produites à plus de 145 millions d’exemplaires par jour, les têtes de stylos à bille ont fait la renommée de l’entreprise : plus de 95 % de celles rangées dans les tiroirs et les mallettes aux quatre coins de la planète sont produites avec une technologie qui provient du Tessin. Bruno Jöhl présente avec fierté le tapis roulant qui fait circuler des machines toutes capables de fabriquer plus de 28 000 pointes de stylos à l’heure. 

Un engagement qui s’inscrit dans la durée

Mikron Machining SA s’engage depuis plus de trente ans dans l’amélioration de son impact environnemental. Elle est l’une des sept entreprises pionnières du Tessin qui a conclu une convention d’objectifs volontaire en 1996 déjà, bien avant l’introduction de dispositions légales contraignantes. Depuis, son engagement pour améliorer son bilan énergétique n’a pas faibli : en 2003, elle conclut sa première convention d’objectifs avec l’Agence de l’énergie pour l’économie (AEnEC) et en 2013, après une nouvelle convention d’objectifs volontaire, elle élabore une stratégie qui débouche sur une rénovation intégrale de ses bâtiments. Grâce à cette rénovation, qui englobe de nouvelles fenêtres, l’isolation du bâtiment, des LED pour l’éclairage et un nouveau système de chauffage, refroidissement et ventilation, Mikron a diminué sa consommation d’énergie par deux tout en réduisant ses émissions de CO2 de plus de 100 tonnes par an. La ventilation a représenté un élément crucial : maintenir une température constante de 20 °C dans une surface industrielle de 6000 m2 demande un système complexe qui chauffe en hiver et refroidit en été. Grâce à une installation de climatisation qui fonctionne au moyen d’une pompe à chaleur en exploitant les rejets de chaleur du processus de production, Mikron Machining SA a réduit ses émissions de CO2 de 130 tonnes par an et sa consommation de mazout de 50 000 litres par an.

Les espaces vides, un luxe énergétique

« La rénovation énergétique et la diminution de la surface ont représenté des étapes décisives », relate Bruno Jöhl durant la visite de la nouvelle zone dédiée à la production de pièces destinées à être utilisées par l’entreprise-même. « Nous avons réduit notre surface en la faisant passer de 4000 m2 à 2000 m2 environ tout en gardant les mêmes capacités de production. Cette réduction nous a permis d’économiser jusqu’à 5000 litres de mazout par mois durant l’hiver. » Au plafond, nous remarquons le nouvel éclairage. Il est lui aussi synonyme d’économies d’énergie et de réduction des coûts : grâce au remplacement d’un millier de tubes fluorescents par des éclairages LED de la dernière génération, « nous estimons les économies à 120 000 kWh par an », se réjouit Lorenzo Medici, conseiller AEnEC. « Chauffer et éclairer des espaces vides est clairement un luxe énergétique que nous ne pouvons plus nous permettre. » 

Optimisation des processus de production

L’optimisation des processus de production constitue une part essentielle de la stratégie de réduction de la consommation énergétique. « Lorsque l‘on produit des millions de pièces, toute modification, aussi modeste soit-elle, peut faire une grande différence », explique Bruno Jöhl. L’équipe de Mikron Machining SA s’efforce donc en permanence d’optimiser le cycle de production en intégrant plusieurs facteurs, dont la performance énergétique des machines et l’amélioration des outils. Ces adaptations contribuent, en termes de durabilité, à réduire l’impact environnemental des machines produites par Mikron Machining SA y compris lorsqu’elles sont employées par les clients de l’entreprise tessinoise. Ce principe vaut d’ailleurs non seulement pour les nouvelles machines, mais aussi pour les plus anciennes. « Certaines de nos machines ont plus d’un demi-siècle et elles fonctionnent encore parfaitement », relate Bruno Jöhl. « Au lieu d’en installer de nouvelles, nous réparons celles qui sont en place et nous améliorons leur performance énergétique, ce qui évite de les remplacer. » Autrement dit, un bonne façon de ménager de précieuses ressources consiste à offrir une seconde vie à des machines et des outils conçus à une époque où les normes énergétiques différaient fortement de celles d’aujourd’hui. 

Une responsabilité qui va au-delà des frontières

L’engagement qu’a pris Mikron en faveur de l’environnement en réduisant sa consommation d’énergie et ses émissions n’est pas limité aux frontières du pays : le groupe déploie sa politique de durabilité de manière uniforme sur tous ses sites, partout dans le monde. À Agno, le montage d’une installation photovoltaïque sur la toiture est l’une des prochaines étapes qui attendent Mikron Machining SA et les conseillers AEnEC qui accompagnent les travaux. La modernisation de la flotte est également prévue : des véhicules hybrides ou électriques seront employés. Enfin, Mikron entend réduire les émissions indirectes liées à la chaîne logistique de transport de ses fournisseurs. En d’autres termes, Mikron poursuit avec un bel élan sur la voie de la décarbonation. 

François Maréchal, professeur EPFL à Sion, a une vision globale, forte, de cet avenir énergétique où nous aurons contraint les molécules carbonées dans des voies autres que celles privilégiées jusqu’ici. Avec des principes imités de la nature – plus qu’éprouvés, donc !

La vision de François Maréchal est condensée dans le schéma ci-dessous : des matières transformées en produits grâce à un apport d’énergie, et des déchets subséquents recyclés en matières premières et énergie. Cette vision se traduit aussi par des mots. Le présent article cède donc la parole à François Maréchal. « C’est l’économie circulaire prônée pour neutraliser nos émissions de CO2. Un cycle comparable assure la pérennité des écosystèmes naturels. On parlera d’écologie industrielle quand des entreprises échangent matières et chaleur, que les déchets de l’une sont ressource pour une autre, quand le tissu industriel interagit avec les grands réseaux d’énergie, les villes… » Ce regret : « Nos industries du passé appliquaient ces principes. Quand une industrie s’installait, elle créait sur son site d’autres industries pour valoriser ses déchets. Mais avec l’évolution économique, nombre de ces industries dérivées ont changé de main, et si le partage d’infrastructures a perduré, les stratégies coordonnées ne sont plus la règle. »

Or, boucler des cycles sera la clé majeure vers la neutralité carbone de nos sociétés. « La nature a de longue date fait le meilleur usage du CO2, contrôlant sa concentration dans l’air grâce à la photosynthèse, à l’origine une invention bactérienne : de l’énergie solaire, du CO2 et de l’eau combinés en glucose, brique première de la biomasse et réserve d’énergie, tandis que de l’oxygène (O2) est libéré. » Le cycle se referme avec la respiration des organismes qui extraient, dans leurs cellules, à l’aide d’O2, l’énergie du glucose, restituant l’eau et le CO2.

Et le CO2 devint encombrant… 

La biosphère a ainsi entretenu stable, hors catastrophes, le taux de CO2 de l’air. Mais le cycle biologique du CO2 a été débordé par l’essor de la société industrielle porté par la combustion d’ancienne biomasse fossilisée – charbon, pétrole, gaz –, libérant à haut rythme du CO2 en même temps qu’on dégradait les milieux naturels. Replanter de la végétation ne suffira pas, et la capture du CO2 n’est praticable que dans certains secteurs. Il nous faut donc établir de nouveaux cycles spécifiques à nos activités d’espèce à part.

« 70 % des émissions de CO2 de l’industrie découlent de besoins thermiques » (schéma, parte supérieure). Mesures évidentes pour réduire ces émissions : chauffer au juste besoin, récupérer la chaleur, la valoriser par échange thermique à l’aide de pompes à chaleur – jusqu’à 10 à 15 unités de chaleur captées par unité investie en électricité. Cela devrait relever de l’ordinaire après 25 ans de lois sur le CO2 et sur l’énergie, et l’inflation récente des coûts de l’énergie ! Au-delà ? « Le renouvelable doit remplacer le fossile. Ça passera par la conversion des surplus de chaleur en électricité et la gestion de l’intermittence des sources renouvelables en intégrant des solutions de stockage d’énergie sous forme chimique – et solutions idem pour stocker les surplus estivaux de la production d’électricité renouvelable. » Un cycle se précise ainsi, reliant chaleur, électricité et divers gaz, à l’instar de ce qu’opèrent photosynthèse et respiration via CO2 et O2.

Jongler avec les atomes et les molécules

« Par électrolyse, on peut convertir le CO2 et l’eau en carburant (méthane, méthanol, kérosène) en libérant de l’O2. Par le procédé inverse, la pile à combustible, ce carburant peut rendre l’électricité en utilisant O2, avec rejet de CO2 et d’eau. Si le CO2 est capturé, stocké et réutilisé, on reproduit de manière industrielle le cycle de la nature. On peut bien sûr intégrer cycles industriel et naturel. »

Autre voie : « En investissant un peu de courant et de chaleur pour gazéifier à haute température de la biomasse – bois, déchets –, on restitue l’énergie solaire captée par photosynthèse sous la forme d’un gaz dit « synthétique » (syngaz), composé de carburants simples : hydrogène (H2), monoxyde de carbone (CO), un peu de méthane (CH4), transformé pour stockage et distribution sous forme de carburants. La source initiale étant renouvelable, les combustions sont neutres en CO2. Capture et séquestration du CO2 après récupération de son énergie, permettront même des émissions négatives. » Et François Maréchal de souligner : « Si la Suisse utilisait ainsi tous ses déchets de biomasse, elle produirait l’équivalent de la quantité de gaz fossile qu’elle importe aujourd’hui et pourrait stocker les surplus d’énergie solaire avec un rendement de 95 % ! » La gazéification, tout comme la pyrolyse, muent donc la biomasse en un carburant homogène, facile à distribuer et stocker. « Et par électrolyse, il est possible d’y insérer un supplément d’énergie renouvelable pour des applications difficiles, tel le transport aérien, où le poids des réservoirs est un élément critique. »

Incitations

Imiter la nature pour mûrir industries, transports, habitat ou consommation
selon des principes par lesquels la vie terrestre s’est développée et a perduré, ne l’avons-nous pas déjà pratiqué en dotant nos sociétés de « systèmes nerveux » intelligents, tout comme l’évolution l’a fait avec les organismes animaux ? Les réseaux numériques se complexifient, accumulent, traitent, utilisent une infinité d’informations pour, entre mille autres finalités, gérer nos ressources, dont celles du domaine énergétique (schéma, partie inférieure).

Conformer nos sociétés à l’image des écosystèmes et des organismes a certes un coût, mais aussi d’immenses bénéfices, maintenant et dans l’avenir. « Selon l’Agence de protection de l’environnement des USA, le pollueur-payeur devrait provisionner 190 USD par tonne de CO2 émise pour permettre aux générations futures de réparer les dégâts du réchauffement. Ce montant, un minimum, représenterait pour la Suisse 30 milliards/an, comme un subside « octroyé » par nos descendants pour nous permettre d’utiliser les ressources fossiles. » Dans l’immédiat, la loi sur le climat et l’innovation soutiendra des projets de décarbonation innovants avec 200 millions de CHF par an.

En conclusion ? En-deçà des « grands principes », le bon sens ? « Pourquoi donc tarder à se libérer d’énergies fossiles lointaines, soumises aux caprices géopolitiques et péjorant climatiquement, financièrement l’avenir, quand des solutions de décarbonation locales n’attendent que de nous devenir… une seconde nature ? »

Au mois de mars, le Parlement a adopté la loi révisée sur le CO2 pour la période 2025 à 2040. Grâce à cette loi, toutes les entreprises pourront obtenir le remboursement de la taxe sur le CO2, qui reste fixée à 120 francs par tonne. Pour ce faire, elles doivent conclure une convention d’objectifs avec la Confédération, s’engager à réduire leurs émissions de CO2 et présenter dans les trois ans un plan de décarbonation, tel que le Plan Décarbonation proposé par l’AEnEC.

Cette nouvelle possibilité de bénéficier de l’exemption de la taxe sur le CO2 pourrait motiver de nombreuses entreprises à investir dans des mesures de décarbonation. Les exemples que vous découvrirez dans ce magazine, tout comme un article captivant qui présente le tandem formé par la convention d’objectifs et le Plan Décarbonation, le montrent : réduire ses émissions de CO2 contribue à réduire sa consommation d’énergie, et donc à réduire ses coûts, mais est aussi bénéfique pour l’environnement. La décarbonation est une opportunité. Saisissez-la et trouvez dans les entreprises qui ont déjà emprunté cette voie une source d’inspiration.

Rudolf Minsch
Président

Frank R. Ruepp
Directeur

Plus d’informations

En vue du Green Business Award 2025, l’AEnEC recherche parmi ses clients des entreprises et des projets innovants. Désormais associés au processus de nomination, nous pouvons soumettre des dossiers jusqu’à fin novembre 2024.

Nous recherchons donc des produits, des technologies ou des modèles d’affaires qui conjuguent rentabilité économique et impact écologique. Les start-ups ne sont pas le seul public visé : PME ou grandes entreprises, les sociétés traditionnelles et bien établies à l’esprit pionnier peuvent elles aussi avoir développé puis commercialisé des solutions innovantes.

Le Green Business Award est le prix le plus important de Suisse dans le domaine du développement durable. Ses finalistes bénéficient d’une communication à large portée et ils peuvent accéder de manière exclusive à des financements pour poursuivre leur croissance.

Comment apprendre à ne pas perdre espoir face à de grands objectifs.

Quiconque entreprend un grand projet – gravir la face nord de l’Eiger, apprendre le japonais, devenir neutre en CO2 – connaîtra le sentiment de perdre espoir face à un objectif ambitieux. 

Prenons l’exemple d’un alpiniste bloqué au milieu d’une paroi. L’étendue de son expérience a failli face à la hauteur de son ambition. Et désormais, sur cette paroi, il n’arrive plus à avancer et ne peut pas redescendre. Pourtant, s’arrêter lui est également impossible. Il existe, en outre, deux autres formes de désespoir : d’abord, lorsque nous n’osons même pas commencer parce que la tâche se dresse devant nous comme un colosse immense, menaçant, invincible. Ou encore, lorsque la route est longue et aride et que l’élan initial s’est déjà consumé alors que le but est encore lointain. 

De nombreuses recherches ont été consacrées à la question de savoir pourquoi nous perdons la motivation face à des tâches impressionnantes et ce que l’on peut faire pour y remédier. L’une des découvertes les plus marquantes a été faite par Karl Weick. Dans un article publié en 1984, ce psychologue du travail a développé la thèse des « petites victoires ». 

Son raisonnement repose essentiellement sur le fait que les objectifs importants et ambitieux ont certes un pouvoir d’attraction émotionnel, mais qu’ils peuvent également se révéler paralysants. En effet, le défi (qu’il s’agisse de stopper le réchauffement climatique comme d’augmenter les ventes de 15 %) peut sembler si impressionnant qu’il nous fige lorsque nous nous voulons nous mettre à l’ouvrage. Weick suggère qu’il peut être plus constructif de décomposer le « grand problème » en « bouchées faciles à avaler », en « problèmes simples » plus modestes et réalisables, afin de remplacer le sentiment d’être dépassé par un sentiment de confiance. 

Il s’agirait alors de diviser l’objectif en petites étapes et de les aborder non pas par un unique pas de géant, mais en faisant de nombreux petits pas. Chaque étape est un petit succès, et tandis que les petites victoires s’accumulent, nous progressons presque imperceptiblement en direction de l’objectif grand et ambitieux. « Dès qu’une petite victoire est remportée, » écrit Weck, « des forces sont libérées qui favorisent déjà la petite victoire suivante. » 

Dans les entreprises, il est beaucoup question aujourd’hui de « visions », de « purpose » ou encore de « North Star ». La stratégie des petits pas consiste paradoxalement à faire l’inverse, c’est-à-dire à consacrer le moins d’énergie possible, voire aucune, à penser à un but qui éclairerait tout le chemin. C’est alors comme pour l’alpiniste : au lieu de se concentrer sur le sommet et d’être tendu, il faut abaisser le regard et poser un pied devant l’autre. Il arrivera un moment où, regardant en arrière, on sera surpris du chemin déjà parcouru. 

Les auteurs

Mikael Krogerus (à gauche), journaliste, et Roman Tschäppeler (à droite), créateur de contenu. Ensemble, ils ont notamment écrit « Le livre des décisions » (réédité en poche chez Alisio en 2018), qui a remporté un très grand succès. Ils tiennent aussi une chronique dans l’hebdomadaire alémanique « Das Magazin », dans laquelle ils dissèquent chaque semaine les pièges du monde du travail moderne.

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